Une étude du Research Triangle Institute (RTI) [1] a récemment calculé l'impact économique des connaissances issues de la recherche et du développement à l'aide de faisceaux de neutrons et qui ont été utilisées pour développer des véhicules électriques. La recherche utilisant des faisceaux de neutrons aux États-Unis et au Canada a apporté de nombreuses contributions précieuses grâce à des expériences menées dans des domaines tels que la compréhension des structures moléculaires des matériaux utilisés dans les batteries ou les pièces automobiles ou susceptibles de l'être. Ces connaissances ont accéléré les efforts de conception de batteries plus performantes pour les véhicules électriques (VE) ainsi que de pièces automobiles plus légères. Ces deux facteurs, qui permettent de parcourir de plus grandes distances entre les recharges, rendent ainsi les VE plus pratiques et accélèrent leur adoption en Amérique du Nord. En retour, les véhicules électriques éliminent les coûts du carburant et les émissions de gaz à effet de serre qui en découlent.
L'étude de RTI a calculé la valeur actuelle de ces avantages de 2017 à 2030 à 48 milliards de dollars, en se basant sur la volonté des consommateurs d'investir dans des véhicules électriques, ainsi que sur les données de vente des fabricants nord-américains qui utilisent la recherche sur les faisceaux de neutrons. Les contributions du Canada aux programmes scientifiques sur les performances des matériaux de batteries remontent aux années 1990 et 2000, lorsque des chercheurs tels que les Professeurs Jeff Dahn (Université Dalhousie) et Linda Nazar (Université de Waterloo) - deux autorités internationales de premier plan dans le domaine des batteries rechargeables au lithium - ont utilisé le Centre canadien de faisceaux de neutrons (CCFN) et ont fait des découvertes déterminantes sur les matériaux des batteries au lithium. Certaines expériences ont été menées au CCFN directement par des chercheurs de Moli Energy 1990, alors fabricant de batteries pour téléphones et ordinateurs portables basé en Colombie-Britannique, en collaboration avec Dahn et d'autres chercheurs tels qu'Isobel Davidson (Conseil national de recherches Canada - CNRC). Par la suite, Dahn et Nazar se sont davantage appuyés sur l'accès à des capacités de faisceaux de neutrons plus récentes, plus brillantes ou plus spécialisées, dans d'autres pays, pour découvrir et développer de meilleurs matériaux pour les batteries des véhicules électriques.
La recherche canadienne sur les pièces automobiles légères remonte encore plus loin, mais elle a été au centre des préoccupations dans les années 2000 et 2010, lorsque des réglementations plus strictes en matière d'efficacité énergétique et d'émissions ont été mises en œuvre au Canada et dans le monde entier. Les progrès dans le domaine de la science des matériaux et des technologies de fabrication ont été cruciaux, et l'allègement a constitué un axe de recherche important pour les ingénieurs en matériaux des universités qui ont utilisé le CCFN au cours de cette période, souvent en collaboration avec des fabricants tels que Ford, GM et Nemak.
Les faisceaux de neutrons sont idéalement adaptés à ce type de recherche et, sans les mesures effectuées dans les sources de neutrons nord-américaines, la commercialisation des véhicules électriques aurait demandé beaucoup plus de temps. L'étude de RTI a calculé la part de l'impact de 48 milliards de dollars imputable à la recherche qui s'était appuyée sur les installations neutroniques, en partant de l'hypothèse que la recherche n'aurait fait gagner que deux ans à la commercialisation. Les résultats estiment l'impact des installations neutroniques américaines à 20 milliards de dollars (source : RTI). La valeur actuelle de tous les investissements américains dans leurs trois principales installations neutroniques sur 70 ans (18 milliards de dollars sur la période 1960-2030) a été amortie par ce seul domaine de recherche sur une période de 13 ans seulement (2017-2030).
De même, le Canada reçoit en retour de la recherche sur l'EV deux fois ses investissements directs dans les laboratoires de faisceaux de neutrons. L'impact économique de l'adoption des véhicules électriques peut être estimé à 4 milliards de dollars en ramenant ce chiffre à l'échelle de l'économie canadienne et au taux d'adoption, dont 1,6 milliard de dollars qui peuvent être attribués à la recherche utilisant les neutrons. En comparaison, la valeur actuelle des investissements du Canada dans les laboratoires de faisceaux de neutrons sur 70 ans est d'environ 750 millions de dollars. Cette estimation comprend le coût direct du laboratoire de faisceaux de neutrons et la part attribuée du coût d'exploitation des sources de neutrons. Ces sources de neutrons, le réacteur NRU du Canada et son prédécesseur, le réacteur NRX, étaient des installations polyvalentes principalement justifiées par leur utilisation pour la production d'isotopes et le développement de l'énergie nucléaire.
Aujourd'hui, l'industrie et les gouvernements investissent massivement dans la transition du secteur automobile canadien vers la production de véhicules électriques, et des entreprises telles que Volkswagen, Stellantis, Umicore et BASF construisent des giga-usines au Canada. Une grande partie de la recherche au Canada est axée sur la réduction du coût et l'amélioration de la performance des batteries, avec à la clé des avantages supplémentaires découlant de l'adoption des véhicules électriques.
Les neutrons restent indispensables à l'analyse de nombreux matériaux de batteries pour véhicules électriques. Les chercheurs canadiens spécialisés dans les matériaux pour batteries continuent d'avoir besoin d'accéder à des sources de neutrons internationales de premier plan pour mener des expériences qui repoussent les limites scientifiques, telles que l'observation directe des ions lithium pendant la charge et la décharge des batteries.