Boeing a déjà estimé le coût du retraitement ou de la mise au rebut des pièces présentant de petites distorsions à environ 300 millions de dollars ou plus par an. Le coût élevé d'une pièce d'avion qui n'est pas parfaite du premier coup peut s'expliquer par les faibles volumes de production sur lesquels se répartissent les coûts élevés de développement de nouveaux produits et de garantie de la qualité. Le coût de la qualité est élevé, car la sécurité et la fiabilité sont essentielles. Le coût du développement de nouvelles pièces est également élevé, car les tendances à la réduction du poids et à l'optimisation des performances repoussent les limites des matériaux et notre connaissance de ceux-ci.
Il n'est donc pas surprenant que les pièces présentant de légères déformations puissent être rejetées ou retravaillées si elles ne s'ajustent pas correctement ou si elles ne peuvent pas supporter les charges qui leur sont imposées. Les distorsions peuvent être particulièrement fréquentes dans les pièces à parois minces, telles que celles utilisées dans le cadre structurel d'un avion. En effet, l'usinage crée des contraintes près de la surface ; pour une paroi qui peut être aussi fine que 0,4 millimètre, la plus grande partie de la paroi se trouve près de la surface, ce qui entraîne souvent des distorsions.
Pour éviter les distorsions, une solution consiste à rendre les parois plus épaisses ; cependant, l'augmentation du poids réduirait l'efficacité énergétique et les performances. Une deuxième solution implique des processus d'usinage minutieux en plusieurs étapes qui augmentent les coûts.
Pour trouver une meilleure solution au problème des distorsions, Bombardier et le Conseil national de recherches du Canada ont parrainé l'équipe de recherche du professeur Jean-François Chatelain à l'École de technologie supérieure. Bombardier a également apporté son soutien à un étudiant diplômé pour travailler dans les deux laboratoires du professeur. Chatelain et dans ses propres installations industrielles. L'équipe a entrepris d'étudier comment la fabrication de pièces à parois minces à partir d'alliages d'aluminium crée des contraintes, qui sont une cause majeure de distorsion et qui peuvent être aggravées par chacun des nombreux processus de fabrication.
L'équipe du professeur Chatelain a accédé au Centre canadien de faisceaux de neutrons pour obtenir des données non destructives sur les contraintes subies par deux pièces modèles « en cours de fabrication » (c'est-à-dire des pièces à parois minces qui reproduisent celles utilisées dans de grandes sections de structures d'avions). Les deux pièces en cours de fabrication ont été réalisées en alliage d'aluminium 7475-T7351. Cependant, l'alliage de la première pièce en cours de fabrication a été fabriqué à partir de billettes d'aluminium standard, tandis que l'alliage de la seconde pièce a été fabriqué selon une recette de traitement spéciale afin de réduire toute contrainte initiale.
L'équipe de recherche a examiné les deux répliques avant et après les opérations d'usinage, en utilisant le balayage laser pour mesurer les changements de forme résultant de l'usinage. L'équipe a constaté que l'ampleur de la déformation était directement liée aux contraintes d'usinage mesurées au niveau du CNBC et que le choix de l'alliage faisait une grande différence. En effet, la pièce utilisant l'aluminium spécialement fabriqué présentait des niveaux de contrainte et de distorsion beaucoup plus faibles.
Cette recherche, publiée en 2012, suggère qu'il est possible de réduire les reprises et les rebuts dans les composants structurels à parois minces en se concentrant sur la réduction des contraintes et en utilisant de l'aluminium spécialement fabriqué qui est presque exempt de contraintes initiales.
Sur la base de ces résultats, l'équipe du professeur Chatelain continue à travailler en partenariat avec Bombardier pour examiner la relation entre la contrainte et la distorsion dans les pièces usinées à partir de tôles.
www.naun.org/main/NAUN/mechanics/17-425.pdf
Cet article de recherche a été republié avec l’autorisation de l’Institut canadien de diffusion des neutrons.